Dans ce chapitre, vous découvrirez les changements profonds apportés à l’école. Le texte présente la vieille dame qu’est notre école sous le nom de Marie-Alice. Un lien avec Sœur Anne-Marie et Sœur Alice qui arpentaient les couloirs de l’école avec un don de soi inégalé.

Voilà plusieurs mois que notre vieille dame s’est éclipsée dans un centre de remise en forme. Cela devenait difficile pour elle de participer à certaines tâches du quotidien. Ce n’est pas donné à toutes les personnes de son âge de suivre la fougue impétueuse des enfants de cet âge. Plusieurs signaux d’alerte s’étaient allumés : les mouvements devenaient imprécis, les articulations grinçantes et la mémoire défaillante. Il fallait réagir. Le temps était venu de se mettre en quête de l’élixir de jouvence : notre amie pensait en toute bonne foi pouvoir relever ce nouveau défi. Il était important à ses yeux de passer le cap. Les enjeux étaient de taille et les étapes toutes compliquées. Il fallait oser ne pas se voiler la face et mettre à jour ce qu’on a trop tendance à ne pas accepter de voir dans le reflet du miroir. En matière de miroir, il n’y avait rien de mieux que les yeux de ces jeunes qui déambulaient dans les couloirs. Quelques regards en coin lui révélaient sans le vouloir les méfaits du temps.

Courageuse, Marie-Alice fit face à ses devoirs : il était temps pour elle de remettre sa copie, analyser les conseils de ses tuteurs et en faire bon usage pour une remise à niveau. Il est difficile à cet âge de se remettre corps et âme à d’autres personnes. Qu’allait-elle devenir ? L’enjeu valait-il qu’elle chancèle ? L’impétueuse aventurière qu’elle est parfois balaya d’un geste nonchalant ces questions existentielles. Il faut sauter pour mieux rebondir, s’éloigner pour mieux revenir, se propulser pour voir l’avenir.

Les débuts furent épiques. Les premiers pas vers la jeunesse retrouvée furent chancelants : voilà que tout se chamboule autour d’elle et que se crée un monde à l’envers. Une vieille dame apprend à marcher, la voie pleine de balbutiements. Malgré la difficulté de l’épreuve, il n’était pas question d’abandonner. Son caractère en acier trempé et béton armé n’allait pas disparaitre sous les coups du charivari des chirurgiens du bâtiment ni la cohue des traits à l’encre rouge des enseignants. Sous les assauts répétés des outils, notre protectrice a lentement glissé dans un sommeil réparateur. Des douleurs se faisaient parfois lancinantes et la bousculaient dans sa remise en question. Elle n’osait trop se regarder, mais à force de méditer, cette prise de hauteur induisit une réflexion profonde. L’angle de vue lui permit de mettre en évidence ses forces et ses qualités.

Il faut dire qu’elle n’était pas seule. Ses piliers n’étaient pas uniquement faits de métal et de ciment. Des centaines de petites et grandes mains vibraient sous ses fondations. Des voix se faisaient entendre pour réviser les fondements mêmes de son existence. Si l’agitation était parfois effrénée, la quête des fondamentaux empêchait la mayonnaise de tourner. L’ensemble de ces impulsions individuelles façonnaient avec rythme les nouveaux traits de notre vieille dame. De cette vieille dame d’ailleurs, elle n’en a plus que la sagesse et l’expérience, car ses contours se sont redessinés. Les rides sont toujours là et c’est tant mieux ! Sa plus grande crainte était de perdre son identité. Son âge, elle le revendique. Quel soulagement de constater qu’elle peut toujours le porter !

Ce qui s’est construit à l’intérieur se voit aussi à l’extérieur. Tandis que les enseignants posaient les pierres de leur nouvel édifice pédagogique, les ouvriers donnaient un corps à leurs pensées. Le bâtiment se dresse fièrement dans cette petite rue de Schaerbeek, animé par un cœur façonné par la mise en commun de dizaines d’esprits échauffés : une bouffée d’air prise à chaque foulée qui redonne du souffle à l’esprit des Annonciades.

Il est rare que Marie-Alice prenne la parole. Sa renaissance lui fait pourtant pousser son gris et annoncer la bonne nouvelle :

Venez, chers enfants ! N’ayez pas peur, je vous ouvre grand mes portes. Je brille de mille feux et je vous éclaire un chemin sur lequel vous pourrez marcher avec confiance. Ayez foi en moi ! Nous vous accompagnerons. Nous vous tiendrons la main, avec pour objectif de vous apprendre à la lâcher.

Prenant bien appui sur ses nouvelles bases, notre jeune demoiselle s’ouvre la voix sous une belle éclaircie. S’il est question nombres, il ne s’agit nullement de notes, mais d’un code binaire : l’école entre de plain-pied dans l’ère numérique. Elle a compris que les jeunes qu’elle accueille vivent dans un monde qui a énormément changé. Parents comme enfants ont de nouvelles habitudes : elle bouillonne d’enthousiasme à l’idée de tisser ses liens. S’il est vrai que les échanges se font parfois virtuellement, ce n’est que le prolongement de rencontres, d’interactions et d’accompagnements bien réels. Vous l’aurez peut-être remarqué, le réveil de la vieille dame a provoqué un changement dans la narration : chaque élément s’est rapproché pour ne plus devenir qu’une seule entité. L’Institut de l’Annonciation, c’est une école riche d’une histoire façonnée au fil du temps par de nombreuses âmes solidaires. Les travaux ont été longs et acharnés. Les maux ont parfois coupé la parole, mais le courage de chacune des parties permet à notre école de rester encore et toujours au mieux de sa forme. Vous y serez accueilli à bras ouverts, chacun y a sa place.